Entretien avec Peau
Derrière un nom simple, se cache une jeune femme à l’univers développé… Peau c’est Perrine, qui cherche à créer son style, et qui réussit à nous troubler au passage. Subjugué au Printemps de Bourges, Le Transistor a sauté sur le prétexte de sa sélection FAIR 2012 pour la rencontrer. Et malgré une musique complexe, repoussant des limites, on rencontre une artiste humble et accessible.
Peau
Peau en quelques mots, c’est … « Pas forcément à ranger dans une case d’un style musical particulier – même si effectivement y’a plein de références très perceptibles. C’est quelqu’un qui cherche à faire son chemin, un chemin personnel ou aussi personnel que possible. »
Peau c’est une seule syllabe pour des milliers de significations. « Je voulais quelque chose d’assez compact. Et j’avais envie de mettre un peu de distance par rapport à moi : je m’appelle Perrine et j’ai des amis qui me surnommaient Po à un moment. Et quand je pensais à ce mot-là, il m’évoquait déjà plein de choses autour des questions d’identité. La peau c’est l’enveloppe de la personne, c’est ce qui définit ses traits, c’est ce par quoi on la reconnaît. » Un surnom qui avait beaucoup de sens pour un projet solo. « C’est aussi l’interface entre l’intérieur et l’extérieur donc tout ce qui est créatif c’est ce qui est censé communiquer à l’extérieur ce qu’il y a à l’intérieur. Et puis j’aimais aussi l’ambivalence que ça avait entre le côté doux, charnel, agréable, et toute une part de la définition de la peau, plus dur, plus proche de vieillissement, la blessure. En fait y’a vraiment plein de résonnances, et on retrouve toutes ces facettes-là dans ce mot. »
Un peu touche à tout, Perrine est surtout curieuse et passionnée. « Depuis longtemps je suis vraiment branchée par tout ce qui est lié à la création artistique. Ca a été dans différents domaines, que ce soit la vidéo, l’image. Et puis, à un moment donné la musique est arrivée et puis c’est dans cet environnement là que je me suis éclatée à inventer des choses. » Son moteur principal c’est l’innovation. « Depuis longtemps, c’est cette envie de créer, d’inventer, et puis dans tout ce que j’aime artistiquement et même dans la vie en général, j’aime les choses qui me surprennent, qui sont hors du commun. »
Lors de ses concerts, Perrine combine le tout pour créer comme une enveloppe maternelle. « J’ai commencé en essayant de construire un univers sonore, donc un répertoire avec un parti pris, une ambiance, dans un premier temps. Après j’avais envie qu’il y ait des déclinaisons. Donc j’ai trouvé le visuel du disque, j’ai fait le clip – que j’ai tourné chez moi parce que, comme j’ai fait de la vidéo avant, j’avais quelques outils à disposition. » Sur scène par contre, Perrine préfère s’entourer de spécialistes. « Je collabore avec quelqu’un qui travaille la lumière, donc c’est pas moi directement qui introduit les choses qui sont projetées en live. Mais ça me paraissait aussi important que sur scène il y ait un univers un peu global. Parce que les artistes comme Björk ou même Emilie Simon, ce qui est intéressant aussi c’est qu’il y a tout un univers visuel qui enrichit leur identité. »
Peau développe d’ailleurs son projet scénique. « Pour l’instant je suis toute seule mais je pourrais travailler avec quelqu’un à la batterie. Une batterie en partie électronique, donc ça va être un travail à deux. Elle apportera des choses – oui parce que c’est une fille. » Ce n’est pas par hasard qu’elle a choisi une fille pour l’accompagner. « D’abord parce que j’ai envie de préserver un univers assez féminin, et puis pour éventuellement faire des contre-chants par moment. Parce que j’harmonise ma voix avec des appareils, mais c’est vrai que sur certains moment ça peut être bien que quelqu’un puisse faire une deuxième voix. »
Pour écrire ses paroles, Peau aime à jouer, tester. « Tout est possible, c’est très empirique. Des fois ça va être une idée initiale et très vite j’arrive à tourner autour de cette idée, souvent au niveau des sonorités qui me guident. Petit à petit un sens se construit et je rentre dans une thématique. » Jusqu’à s’inspirer de recherches Internet. « Et sur certains morceaux, j’avais une phrase initiale et j’avais envie de trouver des choses donc ça m’est arrivé d’aller voir ce qui ressort dans Google. Jouer avec ce genre de hasards ça me plaît bien. »
Elle marche aussi par coups de cœur, comme quand elle a mis en musique la Litanie du Coup de Foudre de Jacques Rebotier. « C’est quelqu’un qui est très polyvalent, dans le monde contemporain. Et ses poésies sont souvent un peu hors du commun. Ce texte là ça faisait longtemps qu’il était dans mes bagages, dans mes dossiers, je le ressortais régulièrement parce qu’il me plaisait beaucoup et puis un jour je l’ai posé sur une ambiance musicale que j’avais commencé à composer, et le morceau a suivi son chemin. »
Cette année marque un tournant pour Peau, puisqu’elle a été sélectionnée par le FAIR. « Ca arrive à point nommé, c’est vraiment le bon moment pour nous parce que c’est un partenaire vraiment fort – qui a une vraie capacité à faire parler d’un jeune projet au niveau professionnel. Moins au niveau public, mais au niveau professionnel c’est vraiment une super carte de visite. » Perrine a rencontré l’équipe qui allait l’aider à développer son projet. « Ca déménage bien. On sent que c’est pas juste un financement, c’est vraiment une globalité. Il y a l’aspect formation et l’aspect partenaire au sens propre : y’a déjà des connexions intéressantes qui se sont faites. Parce qu’en plus on est en création d’un deuxième disque, donc c’était parfait. »
Après Première Mue, Peau prépare donc un deuxième album. « Il sera déjà plus electro, c’est vraiment ce qui m’intéresse bien en ce moment, ce que j’écoute : ces derniers temps c’est James Blake, Caribou, Four Tet… Je suis bien dans ce type de sonorités : ce bain-là de chaleur assez subtile et fine. Et puis ce qui m’intéresse aussi dans leur démarche, c’est cette capacité à créer tout, tout seul. » Perrine est attirée par le monde de l’electro. « Parce que les gars et les nanas sont capables vraiment de maîtriser un objet dans sa globalité. J’adore collaborer avec des gens, mais c’est vrai que j’aime bien aller le plus loin possible avec mes arrangements, les types de son que j’ai envie de produire. J’essaie de pousser le plus possible – parce que je suis pas ingénieur du son- et ensuite je refile le bébé à ceux qui seront capables de l’emmener plus loin. »
Cette interview a été réalisée en partenariat avec Loïc Suty de Green Cats, Babies.
Peau (Interview 10.11.2011) by greencatsbabies2
Réclame
Première Mue, le premier album de Peau est disponible chez Iris Music.
Peau sera en concert à Marseille le 21 mars avec Brigitte, et le 24 mars pour le festival Les Femmes S’en Mèlent à Aubenas.
Remerciements : Pierre Hernicot
Catégorie : A la une, Entretiens
Artiste(s) : Peau
Evenement(s) : FAIR 2012
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