La fin d’une époque
Ça fait tellement longtemps que je ne l’ai pas vu que j’en ai oublié quand c’était. Une bien lointaine époque recouverte de brume. Pourtant chaque jour depuis ces longues années je pense à lui. Chaque instant, un évènement, un objet, un son me rappelle à lui. Lui qui m’a accompagné pendant plus de dix ans. Lui qui m’a appris à découvrir, à m’isoler en m’ouvrant, à me concentrer, à réfléchir, à méditer, à entendre et à écouter. C’est lui qui m’a fait découvrir un long week-end d’hiver Patti Smith. C’est lui qui m’a fait devenir qui je suis.
J’ai appris en début de semaine que je ne le reverrai plus. Jamais. Ça m’a mis un coup. Bizarre, je ne l’avais pourtant pas revu depuis plusieurs années. Mais les souvenirs qu’il a laissé dans mon parcours initiatique de petit enfant de province ne m’ont pas laissé indifférent quand j’ai appris que c’était fini. Si brutalement. Certes, depuis un certain temps on le savait condamné. Depuis des années on savait qu’il ne s’en sortirait pas. Depuis bien longtemps on savait qu’il était voué à ça. Mais quand même. On a beau s’y préparer, ça fait toujours un choc de voir disparaître ce qu’on aime, ce qui compte pour nous.
Il avait 31 ans. Un peu plus âgé que moi, mais pas assez pour disparaître, surtout dans la presqu’indifférence général. Il était le frère que je n’ai jamais eu, 6 ans avant moi il était né, et depuis on ne s’était plus quittés. Lui, la Mère Thérèsa de la culture, le Gandhi de la musique, vient de nous quitter laissant derrière lui une flopée de descendants qui n’égaleront jamais ce qu’il m’a fait vivre. Personne ne pourra jamais le remplacer, lui, mon walkman.
Catégorie : Editoriaux
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