Entretien avec VedeTT

VedeTT c’est une bière belge, c’est une machine à laver, et c’est aussi un groupe cold-pop d’Angers. Après plusieurs années et quelques réajustements, le premier album est sorti… malheureusement c’était le 30 octobre 2015, sous le titre évocateur de Tuer les gens. Mais en vrai, Nerlov s’essayait juste au français pour exprimer ses angoisses. Lors du off du Printemps de Bourges, Le Transistor s’est assis avec l’Angevin pour discuter de sa carrière de rappeur loupée et de ses ambitions assez simple : trouver le bonheur.

VedeTT

VedeTT est donc passé de l’état de trio à solo, Nerlov explique : « J’aime bien avoir des groupes mais j’aime bien aussi avoir ce projet où je suis seul décisionnaire, sans échanges d’idées, du coup ça permet d’aller plus loin : c’est vraiment mes tripes, c’est juste moi. »

Aux débuts, en 2010, VedeTT c’était un duo d’électro-pop. « Rien à voir avec maintenant : c’était dans la veine Digitalism et compagnie. C’était ce qui marchait à ce moment-là : Ed Bangers était partout, on baignait à fond là-dedans. Mais après quelques concerts, ça nous a vite gonflés toutes les machines, du coup j’ai repris la basse, et on a pris un guitariste, qui s’est mis à participer à la compo. Puis on a sorti un EP, plus organique que le premier, avec lequel on a fait pas mal de concerts. » Ça marchait bien, puisque le groupe a été sélectionnés pour les Inouïs du Printemps de Bourgeset pour l’ampli Ouest-France. « On était un peu dans cette démarche d’essayer d’aller vite, mais c’était sujet à débat dans le groupe. Perso, je préférais prendre mon temps et puis au bout d’un moment on a réalisé qu’on n’avait plus trop envie de faire la même chose. Ça m’a permis de faire mon petit album solo, sans la validation de qui que ce soit, sans compromis. »

Depuis, Nerlov a remonté une équipe des musiciens de San Carol et Sheraf. « Chez nous, on appelle ça de la camaraderie. Quand, ado, j’ai commencé à faire de la musique, il y a 10-15 ans, et c’était pas trop l’ambiance. C’était plutôt chacun dans son coin, et la compèt’ entre les groupes. Maintenant, on se file des coups de main, on parle les uns des autres – en bien, évidemment. C’est sain et on se sent plus fort aussi, plus soutenu. » Comme chaque groupe a son univers bien défini, il n’y a pas de concurrence sur la scène angevine. « Notre génération n’est plus bloquée sur un style, on écoute de tout. Je m’éclate aussi sincèrement sur du Timber Timbre que sur les Strokes, ou du Booba… les premiers albums je suis fan ! Ça peut paraître bizarre mais j’adore le rap français. En soi je vomis le fond, par contre la forme je la trouve énorme. »
Nerlov confie au passage qu’il aurait adoré être rappeur. « Mais comme le style que j’aime bien c’est le rap un peu ghetto, j’aurais aucune légitimité à en faire, ce serait vraiment ridicule. Je viens d’un milieu prolo mais pas du ghetto non plus. »

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Cette référence rap est évidente à l’écoute du morceau éponyme, ‘Tuer les gens‘. « Je l’ai écrit plus comme un exutoire, parce que naturellement j’écris les morceaux en anglais. Et au début, je me suis dit que j’arriverais jamais à le faire écouter à qui que ce soit. En anglais ça passe mieux, parce qu’on s’attarde moins à traduire les paroles, donc on peut dire des choses vraiment très personnelles. En français c’est direct plus frontal, t’annonce la couleur. » Ce morceau révélateur est né en dernière minute. « Je voulais faire un album de 11 titres, parce que quand j’étais ado les albums avaient 11 titres – comme mes albums préférés de Deftones. J’avais pas envie d’un album à rallonge, je voulais aller à l’essentiel. Tout était prêt, fini mais j’étais quand même dans une phase de création, donc j’ai commencé à composer, et ça m’est venu comme ça. Du coup j’ai décidé de virer un autre morceau parce que je voulais garder les 11 titres. »

Au final, ce morceau improviste a donné le nom à ce premier album. « C’est assez fort, ça veut dire plein de choses, et c’est vraiment ce que je ressens, ça fait part d’un paquet d’angoisses… On connaît tous ce moment, quand on se couche, et qu’on se met à penser à mille trucs… Je trouve qu’il y a un climat anxiogène en France, les gens ont du mal à être heureux. On est tous un peu en quête du bonheur, perso j’ai du mal à trouver un bonheur permanent, c’est compliqué. Je cherche peut-être un idéal, mais c’est vers ça qu’il faut tendre. »

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Cet album, c’est le reflet de sa recherche intransigeante du bonheur. « Je suis pas convaincu de pouvoir être heureux dans la musique : faire de la musique c’est un enfer, c’est un putain de fardeau. C’est quelques instants de bonheur mais extrêmement intenses : sur la route avec les potes, les concerts, pondre un bon morceau, les retours des gens… Par contre le reste du temps, chez toi à attendre, c’est vraiment triste. » Mais si Nerlov ne peut trouver le bonheur dans la musique, il ne peut le trouver ailleurs. « Plein de fois j’ai réfléchis à faire autres chose, mais j’en serai incapable. Une semaine sans faire de la musique et je pète un plomb. C’est pour ça que j’ai sorti cet album sur une petite structure, sans pression. L’idée c’est pas de percer à tout prix, sinon même les moments d’intense bonheur sont gâchés. Maintenant on fait ce qui nous plaît et j’ai l’impression que ça marche mieux. »

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Nerlov ne veut plus tenter les tremplins comme il a pu le faire auparavant. « C’est des gros accélérateurs mais avec VedeTT on va à notre vitesse. On s’y est retrouvés avec San Carol mais le chanteur avait même zappé qu’il avait inscrit le groupe ! On y est allés, tout en restant persuadés qu’on serait pas pris, parce qu’il y avait des groupes bien plus formatés. Et en fait on a été le seul groupe retenu, c’est marrant. On se dit que c’est une histoire de réseau, et puis la preuve que non : ils sont assez indépendants, ils ont fait avec leur feeling. »

Réclame

Tuer les gens, le premier album de VedeTT, est paru chez Echo Orange.


Remerciements : Adrien Durand

Catégorie : A la une, Entretiens
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2 réactions »

  • Gagne une hotte de Noël - Top 2016 | Le Transistor :

    […] Au début, VedeTT c’était un groupe d’electro-pop sur Angers, puis Nerlov a voulu reprendre les rênes, pour aller au bout de ses idées. Son premier album cold-pop et mélancolique est paru en fin d’année dernière, mais son titre malheureux ne lui a pas permis de le défendre comme le mérite. Pourtant Nerlov est clairement en quête du bonheur, cet album le prouve ! Lire l’interview de VedeTT […]

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