Entretien avec Hinds
Dans les surprises de la rentrée, il y a ce groupe garage, Hinds – autrefois connu sous le nom de Deers, mais des Canadiens au nom à la consonance similaire s’est senti menacé et les a forcés à changer de nom. Qu’à cela ne tienne, les Espagnoles seront des biches à défaut de pouvoir être des chevreuils ! A La Route du Rock, Le Transistor a rencontré ces quatre jeunes femmes fraîchement débarquées sur la scène indé. Pour parler féminité, légendes et fringues.
En bonne fée, les Hinds ont la batteuse des Vivian Girls comme tour manager aux Etats-Unis.
Ade : Elle nous a raconté tellement d’histoires de l’époque où elle était dans le groupe !
Ana : ça nous a beaucoup aidées de savoir comment elles fonctionnaient entre elles.
Pour Hinds, tout a commencé en 2011, quand Ana et Carlotta sont parties en vacances.
Carlotta Cosials (chant) : On savait pas jouer du tout, d’aucun instrument. Mais on s’est retrouvées à tripatouiller des guitares, et ça nous amusait beaucoup.
Ana Garcia-Perrote (guitare) : On a continué parce qu’on aimait bien le son… Quand on enregistrait une chanson, on l’écoutait en boucle parce qu’on aimait bien entendre nos voix s’entremêler.
Carlotta : Jouer est devenu une réelle drogue. Donc au retour de vacances, on a décidé de monter un groupe. Et en octobre 2013, on s’est mises à composer notre propre musique, pour ensuite l’enregistrer avec un ami.
Ana : Sur l’album, c’est moi qui faisais les batteries et Ana la basse, et c’est là qu’on s’est dit qu’il fallait vraiment qu’on soit quatre pour être un vrai groupe. Donc on a demandé à notre amie Ade…
Carolotta : On l’a suppliée en fait de jouer avec nous ! (rires) Et pour son anniversaire on lui a offert une basse, histoire de la forcer à rejoindre le groupe. Après on a rencontré Amber via Internet, parce qu’elle était la seule batteuse à Madrid…
Ade Martin (basse) : du moins la seule qui n’avait pas de groupe.
Une chose importante pour Ana et Carlotta, c’était de n’avoir que des filles dans leur groupe.
Carlotta : Le problème c’est que quand il y a des filles et des garçons dans un groupe, tout le monde pense que c’est les garçons qui composent. C’est certain.
Ana : Les filles sont là pour faire joli sur les photos en somme
Carlotta : Et les garçons c’est le cerveau. Allez vous faire foutre !
Ade : Même si c’est pas forcément la première chose qui vient à l’esprit, le doute est présent dans la tête des gens.
Ana : En plus, on l’a vécu quand on jouait dans d’autres groupes ! Le mec qui vient parler au groupe, soit il nous calcule pas, soit il nous mate et tente de nous sauter.
Carlotta : Parfois quand on est en festival, les gens nous voient en backstage et nous prennent pour des groupies. Putain ! Je sors de scène, mec !
Dans la petite scène musicale de Madrid, c’est The Parrots (avec qui elles ont sorti un split EP) qui leur a filé un coup de main.
Ade : La première fois que j’ai joué de la basse, c’était sur la basse de Pete de The Parrots. Et c’est lui qui a repéré la basse que les filles m’ont offerte.
Ana : Pete a aussi filé sa guitare à Carlotta en cadeau. Et on utilisait son ampli jusque y a 4 mois je crois. Et maintenant c’est lui qui utilise le notre !
Carlotta : On est originaires de Madrid, qui est une petite ville, même si c’est la capitale. Donc la scène musicale est minuscule. Quand un groupe monte, on les voit jouer partout, mais pour le reste du monde, ça ne compte pas du tout.
Ana : Néanmoins, même si elle est petite, elle est instense !
Ade : Il y a trop de concerts géniaux chaque soir, on ne sait jamais quel groupe aller voir ! Mais c’est sûr qu’il n’y a pas tant de groupes espagnols qui arrivent à s’exporter.
Carlotta : Et c’est triste à dire mais surtout un groupe de filles, il n’y en a pas trop… voire pas du tout.
Dans l’histoire de la musique, les Hinds regrettent de ne pas trouver de modèle à suivre.
Ana : Peut-être que si on mixe dix femmes de l’histoire de la musique, on pourrait créer notre modèle…
Carlotta : Un soir, j’étais avec mon grand frère, un passionné de musique, et on a cherché toute la nuit sur YouTube. Forcément, il devait y avoir une artiste qui serait une inspiration pour nous ! Et en lisant tous les crédits des compositions des légendes, on a remarqué qu’aucune des chansons n’avait été écrite par une femme.
Ade : Le rock’n’roll a toujours été un truc de mecs.
Ana : De savoir que les paroles comme ‘Respect‘ d’Aretha Franklin a été écrite par Otis Reading, ça nous a foutu en l’air.
Carlotta : Cette soirée a marqué un réel tournant pour nous, parce qu’on a réalisé que les paroles qui inspirent genre « je suis là et je fais ce que je veux » sont hypocrites. C’est pour ça qu’avec Hinds, on a réellement envie d’être indépendantes.
Ade : Ce qui est rageant, c’est qu’il y a tellement de groupes de mecs qui nous inspirent. Genre on aime absolument tout ce qu’ils ont sorti : The Black Lips, Mac Demarco, Ty Segall, dans tous les styles imaginables. J’adore tout ce qu’ils font ! Mais on trouve pas de femmes que l’on respecte de la même manière….
Ana : C’est pour ça qu’on essaie de trouver notre propre manière de nous y prendre. Le fait de ne pas avoir de modèle…
Carlotta : nous permet de trouver notre propre voie.
Ade : Toutes les décisions que nous prenons, ce n’est pas en rapport à qui que ce soit. On crée nos propres lois.
Créer leurs lois passe aussi par le choix des tenue vestimentaire sur scène ou dans leurs vidéos.
Carlotta : Limite, on s’habille mieux quand on sort à Madrid un soir de semaine, que pour monter sur scène.
Ade : C’est pas qu’on a pas envie d’être jolies, c’est juste qu’on s’habille comme tous les jours.
Ana : Mais attention tout ce qu’on peut faire peut être retourné contre nous ! Ca ne veut pas dire qu’en tant que fille, je dois mettre un t-shirt trop grand pour éviter d’être sexy. Non, on n’est pas du tout dans le calcul ! C’est juste que j’ai envie de m’habiller comme ça, sans idée particulière derrière la tête.
Carlotta : Ce qui nous énerve c’est que pour un mec sur scène, on va pas décrire sa tenue, il peut mettre ce qu’il veut, voire se pointer sur scène tout nu… et personne va dire qu’il y est arrivé parce qu’il s’est foutu à poil ! Mais pour les filles, notre tenue va forcément nous catégoriser.
Ade : J’aimerais pouvoir dire qu’on n’a pas à mettre des sweatshirts trop grands pour réussir à se faire respecter dans cette industrie.
Ana : C’est pour ça qu’on insiste sur les deux plans, jolies et décontractées, sans style prédéfini, pour que personne ne cherche à nous catégoriser. C’est pas une mauvaise chose de s’habiller comme une fille, si on en a envie !
Carlotta : C’est pas une mauvaise chose, mais c’est cette société qui nous fait nous sentir mal d’avoir envie d’être jolie.
Ade : Maintenant qu’on a un groupe, on y pense plus qu’avant, parce que l’image est importante. Quand on fait un concert, parfois l’une d’entre nous se sent girly, et a envie de porter un truc court, et peu importe si l’autre a envie de mettre un pantalon : chacune fait ce qu’elle veut, c’est parfait. Allez vous faire voir avec vos idées préconçues ! Et si le lendemain elle a envie de porter juste un t-shirt, c’est pas un souci. Nos tenues sont juste normales !
Réclame/
Leave Me Alone, le premier album de Hinds, est à paraître en janvier 2016.
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[…] Hinds restent totalement naturelles. Sans chercher à plaire, sans chercher à séduire. Lire l’interview de Hinds Lire le live report de Hinds à la Route du […]
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