Entretien avec Jimmy Whispers
Jimmy Whispers – c’est le surnom qu’on lui donnait au lycée parce qu’il était timide – vient de sortir son premier album, Summer In Pain. Des morceaux bruts, pris sur le vif, enregistrés à l’iPhone, d’un réalisme saisissant. Ce musicien mais aussi street-artist a par la suite décliné un festival afin de lutter contre la violence qui règne dans les quartiers de Chicago. En vadrouille aux Etats-Unis, Le Transistor s’est choisi le meilleur guide de la ville !
Rendez-vous est pris dans les jardins du fameux Art Institute. Bien vite, on s’éloigne du majestueux lac Michigan, pour se poser dans un bar ambiance gangster pour boire une Slitz. Jimmy Whispers précise avec un clin d’œil appuyé : « Ici on a le droit de fumer, mais comme c’est interdit par la loi, il n’y a pas de cendriers, chut ! »
Summer In Pain vient de sortir, mais ça fait déjà plus de deux ans que Jimmy Whispers a fini de l’enregistrer. « Je voulais me tester en quelque sorte, voir si cet album valait le coup d’être fait : s’il était suffisamment bon pour être publié. Une fois le mastering fini, j’ai voulu faire plein de concerts pour savoir si je pouvais créer une communauté autour de ma musique. Mais je ne voulais pas attirer les gens avec l’album, je voulais d’abord voir si les gens étaient intéressés avant de le sortir. »
Son enregistrement est somme toute sommaire : un orgue et un iPhone sont ses seuls instruments. « Tous les jours j’enregistre une chanson, ou presque. Parfois je lui donne juste un numéro, parfois j’ajoute une petite note, pour me souvenir du sujet. Au cours des deux dernières années, j’ai accumulé près de 1 500 enregistrements. Donc c’est pas pour les jeter après ! » La plupart du temps, Jimmy Whispers garde la première prise. « Tout se fait sur le moment, vraiment. Par exemple, je vais avoir une idée qui me trotte dans la tête, et quand je vais lancer l’enregistrement, elle va sortir toute seule. Rien n’est écrit, parce que j’aime pas m’assoir pour chercher à trouver la phrase parfaite, je le dis comme ça me vient et c’est cette formulation spontanée que je garde. »
Afin donc de faire connaître sa musique, Jimmy Whispers a lancé un festival en 2013. « C’était au profit de l’organisation CeaseFire [Cessez-le feu] parce qu’il y a beaucoup de fusillades à Chicago. C’est souvent des histoires de gangs, des règlements de compte entre dealers, mais il y a beaucoup trop de violence et d’armes à feu en général. Et ce festival, c’était pour attirer l’attention sur ce problème, et récolter de l’argent pour cette cause. » L’année suivante, ce grand fan des Chicago Red Bulls l’a décliné en version basket. « C’était pas un grand festival comme Lollapalooza, c’était juste avec six groupes par jour, sur un week-end. Et l’année suivant, j’ai organisé un festival différent, intitulé Hoop Dreams, hoop comme le but en basket. J’ai invité des célébrités et des groupes de musique basés à Chicago pour disputer un tournoi de basket, toujours au profit de la même organisation. Et les groupes jouaient entre les matchs. »
Au fur et à mesure, de plus en plus de monde s’investit dans les projets imaginés par Jimmy Whispers. « Cet été, j’aimerais refaire le Hoop Dreams, parce que tout le monde s’est bien amusé. Et en plus, on a trouvé une salle plus grande. En fait, je reçois de l’aide de la part de promoteurs pour le monter, ce qui me soulage beaucoup. Il y a plein de gens qui me file des coups de main, j’ai beaucoup de chance. » Une brasserie locale a même baptisé une de leurs bières Summer In Pain. « Les fondateurs de cette brasserie viennent souvent à mes concerts, et ils ont voulu faire une bière pour fêter mon album. Moi je trouvais ça nul d’avoir une bière avec mon visage dessus. C’est là qu’ils m’ont proposé de la vendre pour l’organisation Cease Fire, donc j’ai accepté. Personnellement, j’ai pas envie de me faire de l’argent sur un dérivé de mon action. Je veux bien gagner de l’argent avec ce que je fais, mais je ne vends pas de bière, je joue de la musique. »
Jimmy Whispers s’est engagé dans cette lutte suite à un documentaire. « J’avais toujours entendu parler de Cure Violence et CeaseFire, mais le documentaire détaille bien leurs actions au quotidien. C’est pour ça que j’ai décidé de les contacter : le film a eu un impact réel et m’a donné envie de travailler avec eux. Cette violence est en permanence autour de nous, et même si on se sent concerné, c’est toujours compliqué de savoir quoi faire, comment faire pour aider. »
Pourtant, on ne ressent aucune violence sur l’album Summer In Pain. « Les chansons ont toutes plusieurs sens. Par exemple, la chanson ‘Keeping Me High’ parle de drogues, mais aussi d’amour. Et ‘Michael Don’t Cry’ sonne comme une chanson d’amour pour un garçon alors qu’à la base elle est pour mon neveu. C’était une berceuse, parce que bébé, il pleurait beaucoup. Et finalement le morceau est parti dans plein de directions différentes. Parce que les sentiments abordés sont complexes en fait. » Par contre, la douleur est présente, mais malgré tout, Jimmy Whispers est un grand optimiste. « Certains de mes concerts se finissent – je le fais pas toujours mais souvent – je joue ‘What A Wonderful World’ de Louis Armstrong. Je commence par parler des guerres et de la violence dans ce monde si merveilleux, et ensuite, je fais danser les gens ensemble. J’essaie de les convaincre que les choses peuvent s’arranger, ça rend tout le monde heureux… J’essaie de faire passer un message positif. »
En live, Jimmy Whispers a même une réputation d’être décalé, voire loufoque ! « J’aime pouvoir être libre de mes mouvements donc je joue sans instrument. J’ai juste mon micro, un peu à la manière d’un animateur. En fait, j’ai enregistré une version de mes chansons sans voix, pour pouvoir chanter par-dessus. Comme ça je suis indépendant, c’est beaucoup plus simple puisque je n’ai pas d’équipement ! Et ça me permet de laisser libre cours à ma folie. »
Réclame
Summer in Pain, le premier album de Jimmy Whispers est paru chez Field Mates Records.
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Catégorie : A la une, Entretiens
Artiste(s) : Jimmy Whispers
Production(s) : Field Mates
Ville(s) : Chicago
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