John Cale à la Philharmonie

Pour inaugurer l’expo Velvet Underground, la Philharmonie invitait le co-fondateur du groupe pour un concert inédit avec, pour l’accompagner, des artistes plus ou moins influencés par la mythique formation du New-York arty des années 60 : Carl Barât et Pete Doherty de The Libertines, Saul Williams, Mark Lanegan, Etienne Daho, Lou Doillon et Animal Collective. Au programme, The Velvet Underground and Nico, le premier album devenu culte, l’album à la pochette ‘banane’ dessinée par Warhol il y a 50 ans. D’ailleurs, quand John Cale entre en scène, c’est en tenant bien haut une vraie banane, sous l’ovation de 3 000 spectateurs.

John Cale

Une formation rock classique et trois violonistes entourent un élégant John Cale en étrange veste à damiers, debout derrière un synthé multifonctions et un Macbook. Respecter l’ordre de l’album n’est pas primordial, puisque le concert commence sur ‘I’m Waiting For The Man‘. Respecter le son n’est pas vital non plus, mais il est tant figé dans une époque qu’il serait effectivement bon de s’en dépêtrer, surtout sans les principaux acteurs : Lou Reed, Nico, Sterling Morrison et Moe Tucker.

Le but n’est clairement pas de se replonger dans les ambiances de l’époque : pas de percus folles, ni de violons déglingués, et encore moins de guitares nasillardes et chaleureuses… Des sonorités numériques entre trip-hop et indus résonnent, lancinantes, avec parfois une basse jouée à l’archet.

Carl Barât et Pete Doherty déboulent et entrechoquent leurs guitares en signe de top départ pour ‘European Son’. Les longues parties instrumentales font la part belle aux riffs échevelés et aux coups sur les amplis pour décupler le côté noisy. Cette chanson va bien aux Libertines, ou plutôt, ils vont bien à cette chanson.

John Cale va ensuite chercher en coulisses Saul Williams qui arrive les yeux bandés pour chanter avec lui ‘Lady Godiva’s Operation‘, extrait du second album White Light / White Heat. Le moment est nébuleux, aquatique, avec des photos de Lou Reed et Nico ondulant en fond de scène. Sur une rythmique électro presque dub, le chanteur aveugle le temps du morceau en impose par son charisme et déclenche une ovation. Mark Lanegan enchaîne avec ‘All Tomorrow’s Parties‘. Impassible face à son pupitre, il paraît éteint comparé au personnage Saul Williams.

Quand John Cale attrape son violon électrique pour ‘Venus In Furs‘, on retrouve les ambiances qui ont construit The Velvet Underground, mais le son est vraiment brouillon. Un réel contraste avec Etienne Daho qui reprend ‘I’ll Be Your Mirror‘, dans une interprétation encore plus douce que l’originale, mais qui lui colle plutôt bien. Après la lecture de ‘The Gift‘ sur une basse tournoyante et des sons obscurs, Animal Collective rameutent leurs jolis choeurs et leurs claviers sautillants sur ‘There She Goes Again‘.

Pour ‘Sunday Morning‘, John Cale chante seul, sur des nappes de synthés faussement modernes… à en perdre la mélodie de base jouée au célesta ! Puis The Libertines reviennent sur ‘White Light / White Heat‘, mais le son est vraiment criard, suraigüe… Lou Doillon apaise le jeu de son intense voix rauque avec ‘Femme Fatale‘ sur fond de cordes onctueuses, et fait fi de l’apostrophe la traitant de pistonnée.

Mark Lanegan revient pour ‘Black Angels Death Song‘, avec des sonorités guerrières à la Massive Attack. Pete Doherty et Carl Barât assument ensuite parfaitement ‘Run Run Run‘, carrément garage, mais le public ne suit pas… Le magnétique Saul Williams permet de replonger dans l’ambiance avec ‘Heroin‘, avec Nick Franglen du groupe Lemon Jelly à l’harmonium indien. Et pour mener au final, Mark Lanegan propose ‘Sister Ray‘, en version limite dancefloor, mais encore chanté sans émotion…

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John Cale a donc rejoué l’album à sa sauce. Dans toute cette numérisation, on n’a pas retrouvé la poésie suintante et les sonorités de guitares brûlantes de l’époque Lou Reed. Sans pour autant être conquis par ces expérimentations plutôt désuètes. Et malheureusement, l’acoustique de la Philharmonie ne semble pas adapatée aux musiques amplifiées. Cela dit, l’expo est vraiment intéressante.

Réclame

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