Entretien avec OK Go

OK Go a marqué les esprits en 2009 avec la vidéo de ‘Here It Goes Again‘, où quatre geeks qui courent sur des tapis de course. Ce clip a tellement été relayé, que le groupe s’est même retrouvé dans la série The Simpsons. Mais derrière cette image potache et décalée se cachent une amitié solide et surtout un leader plus qu’impliqué politiquement. Rencontre avec Damian Kulash lors de la sortie du troisième album Of the Blue Colour of the Sky.

OK Go

Car oui, OK Go est un groupe engagé. Pour preuve, voici la réaction de Damian Kulash à l’évocation de leur titre ‘How your band can fire Bush’: [brut] « He’s completely fucked America, America’s fucked and in return of course America fucks the whole fucking world. »

Cinq années se sont écoulées depuis la sortie de Oh No. «Notre dernière tournée a duré plus de deux ans et demi et nous a transformés. Quand on s’est posés pour écrire le prochain album, toutes les techniques qu’on utilisait pour composer ne fonctionnaient plus. On a cherchait de nouvelles méthodes de compositions, mais on arrivait à rien : c’était tellement frustrant ! Les seules choses qui prenaient forme étaient de mauvaises copies de ce qu’on avait déjà fait. » Certains se seraient pas gênés pour sortir une copie de précédents albums, se reposant sur ce qui marche commercialement, en attendant de trouver son nouveau son. « Je trouve ça plus révoltant de faire quelque chose que j’aime pas qu’un truc qui ne compte pas : ça a un goût de lait rance. Certains disent que c’est mon côté perfectionniste… » Damian Kulash livre alors leur recette : « On a tout repris à la base, avec juste un rythme, une tonalité au synthé, et on les a additionnés : la plupart du temps ça donne rien et parfois, ça te donne de l’amour, de la rage, ou de la mélancolie… ou toutes ces choses à fois enveloppés dans un sentiment en 60 dimensions. La musique prend son sens quand soudainement 1 + 1 = 500. »

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Le sentiment qui ressort de ce Of the Blue Colour of the Sky, c’est la mélancolie. « L’histoire remonte au XIXe siècle : un général de l’armée à la retraite s’était acheté une vigne en serre. Il s’est mis à faire des tests en teintant des pans de verre en bleu, malheureusement pour lui, c’était pas un scientifique hors-pair. Or, magie ! Ses vignes ont commencé à pousser vitesse grand V. Il devint obsédé par la couleur bleu, soi-disant qu’elle pouvait soigner toutes les maladies et finit par obtenir le brevet de la couleur bleu ! C’est extraordinaire : imagine posséder une couleur ?! » Damian Kulash compare cette histoire à celle de leur album : « C’est plein d’espoir tout en étant triste : c’est un album de dance avec des paroles déprimantes. Ce général avait tellement envie de rendre le monde meilleur qu’il a réussi à convaincre le monde entier, pendant deux bonnes années, d’un truc qui n’a jamais marché. Il y a un peu de ça dans nos chansons : on essaie tellement d’être optimiste que ça n’a plus d’importance si on a raison ou tort. Tout est dans le fait d’essayer… je trouve qu’il y a beaucoup de poésie dans l’échec. »

Cet album a un son très electro, probablement influencé par le choix du producteur, Dave Fridmann (The Flaming Lips, MGMT). « En fait, le frisson qui nous a d’abord attiré dans la musique quand on avait 15 ans, c’était le fait de jouer devant un ampli à fond, qui produit ce sentiment de volume et d’énergie. Or, après 7 ou 800 shows, quand tu pousses l’ampli à fond tu ne ressens plus ce frisson. L’électro c’est ce qui reste quand le rock s’est débarrassé de ses influences. On a voulu garder ce qui compte pour nous plutôt que ce que nous savons faire par défaut. »
Avec Of The Blue Colour of the Sky, OK Go s’éloigne de ses influences Pixies pour se rapprocher d’un Prince. « Ce sont les entités musicales les plus influentes de ma vie. Leurs styles sont strictement différents, mais les deux s’expriment avec leurs tripes. Purple Rain et Doolittle sont les deux albums les plus importants de ma vie. Sur notre dernier album, on ressent moins les Pixies au niveau des chansons, par contre ils sont présents au niveau du sentiment de déchirure.
Pourtant, Damian Kulash a partagé la scène avec Black Francis. « Ce que j’aime avec les Pixies c’est qu’ils prennent des choses brisées et les transforment en choses magnifiques ; c’est pas joué de manière exceptionnelle, mais les sentiments sont tellement intenses. »

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OK Go est surtout connu pour les vidéos farfelues que le groupe produit lui-même. « Avec Tim on s’est rencontrés on avait 12 ans : on habitait à plusieurs milliers de kilomètres mais Tim passait les vacances chez moi parce que mes parents avaient une caméra. Ce qui nous a toujours motivés c’est la joie de créer des trucs : quand on kiffait un groupe, on faisait des vidéos sur leurs chansons. Je me souviens, un groupe qu’on adorait s’était fait voler son van, alors on leur a envoyé tout un tas de petits vans qu’on avait fabriqués – c’est tellement geek et ridicule ! » Ces souvenirs d’enfances expliquent beaucoup leur univers. « Avant, les gens voyaient un clip comme une pub pour la musique. Nos vidéos font partie intégrante de notre démarche créative, elles sont aussi importantes que notre musique. On se marre vraiment à les faire, mais on doit être réaliste, on doit notre succès à une question de timing : l’avènement de la vidéo internet était pile au moment de la video ‘Here It Go Again’, donc à cette époque c’était pratiquement la seule vidéo à se voir relayée. »

Damian Kulash entreprend de raconter le processus de création de leurs vidéos. « Ca démarre généralement par un délire autour d’une chorégraphie, et on change juste un élément de réalité : pour ‘Here It Goes Again’, c’était une danse, mais sur des tapis de course en mouvement. ‘WTF?’ est parti d’une choré, mais à chaque fois qu’on bouge, on laisse une trace de couleur : on nous voit jouer, essayer de comprendre les limites de cette idée, comment jouer avec ces règles. » Même s’ils aiment imaginer des chorégraphies, ce n’est pas systématique pour le groupe de les intégrer au concert. « On se bat sans cesse contre les idées excitantes qui ont le malheur de ressembler à celles qu’on a déjà réalisées : continuer dans un certain sens juste parce que les gens s’attendent à nous voir le faire, c’est pas drôle. Pour nous, interrompre le concert en jouant des cloches de vache c’est tellement plus marrant. Le but de nos chorés pendant le concert, c’est pour casser cette barrière avec le public, tout simplement parce qu’elles déroutent. Les cloches ont le même effet, avec l’avantage d’être musical. »

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Ce qu’on oublie facilement en parlant d’OK Go, c’est le fait que le groupe soit engagé. « C’est une chose que de composer une chanson pour véhiculer un message politique, mais c’en est une autre de parler directement de politique. Etre connu ne nous rend pas plus qualifiés d’avoir ces idées, ça veut juste dire que plus de gens vont entendre ce que nous avons à dire. » En réponse à ceux qui disent que c’est dangereux pour un groupe d’énoncer une opinion politique. Damian s’exclame : « Mais qu’est-ce que ça dit sur nos fans ? Ils veulent que leur musique soit vide ? Ils s’intéressent pourtant à ce que j’ai à dire à propos de l’amour, non ? La politique c’est être humain, c’est essayer d’aider à faire avancer le monde, ça fait partie de la vie. »


Remerciements : Julien Marquant

Catégorie : Entretiens
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  • - Le Transistor | Le Transistor :

    […] été marquées par des envies punk dans la rythmique mêlées à des mélodies très accrocheuses. Pensez à OK Go mais en mode comique : car ce qui fait le sel de leurs concerts, c’est plutôt la mise en scène du duo Keith […]

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