Beaffle #19 : Les Victoires de la Musique
Pas plus tard que vendredi dernier avaient lieu les Victoires de la Musique, où, soyons clairs, la musique n’a rien gagné. C’est précisément un 14 février que les français avaient choisi la Marseillaise comme chant national en 1789. Et c’est aussi un 14 février que YouTube a été lancé en 2005 sonnant le début des défaites de la musique en ligne.
Mais dans notre année 2014, en cette Saint Valentin tout à fait quelconque, tous les musiciens ont donné la main de l’industrie de la musique pour se plaindre de leur conditions d’intermittents, en attendant la Saint Marguerite où je n’ose même pas imaginer ce qu’ils vont leur sucer.
A chaque trophée qui passait des mains d’une navrante caution artistique à une nouvelle starlette annuelle, un petit discours y était prononcé. Certains remercient leur mère, leur label, leur manager et tous ces mecs et macs qui lui leur permis de se faire reconnaître, alors que le père de Stromae toujours pas. Ca s’autosuce à heure de grande écoute, comme tous les ans pendant 3 heures après s’être lamenté pendant 3 jours au MIDEM quelque semaines avant.
Et comme chaque année j’attends qu’un mec fasse un discours différent sur la musique.
Chaque année, j’espère que le discours qui marquera les esprits sera plus profond que les bavures orales de Cali aussi engagé qu’un collégien dans une élection de délégué de classe.
Chaque année j’imagine un Damien Saez qui critique sons système en chanson, mais avec des couilles.
Chaque année j’aspire à un discours à la hauteur de la baffe de Bertrand Cantat à Messier sous les hypocrites applaudissements d’une salle qui lui a déroulé le tapis et les comptes rouges pendant des années.
Chaque année j’escompte autre chose que les interminables lamentations des intermittents faussement soutenus par des présentateurs qui s’enferment dans leur loge à chaque coupure de pub pour ne pas sentir l’odeur de sueur des techniciens.
Et chaque année depuis bientôt 30 ans, chaque nouvelle starlette cathodique du moment qu’on feindra d’avoir oublié pour son prochain album, chaque ancêtre mélodique, chaque présentateur cocainomane, chaque apporteur d’enveloppe cachetonné oubliera de remercier ceux qui font la musique.
Comme depuis toujours les chefs de projets, les attachés de presse, les journalistes, les musiciens, les photographes, les directeur marketing, les caméras et tous les mecs réunis devant la scène en attendant l’open bar se branloteront la nouille entre professionnels en oubliant qui fait la musique. En oubliant qu’ils n’existent pas seulement par “le public”. “Les gens” comme disait Brel. Cet amas bêlant de clients plus ou moins humains destinés à courir dans les rayons des plus glaques rayons cultures pour acheter des albums.
Chaque d’entre eux oubliera ces dizaines de milliers de personnes qui font exister la musique en France.
Ils sont bénévoles dans des associations de village ou des MJC. Ils sont professeurs des écoles ou dans des collèges. Ils gèrent des écoles de musique. Ils dirigent des chorales, des fanfares, des harmonies ou des orchestre. Ils organisent des concerts pour une dizaine de personnes ou des festivals pour des milliers. Ils écrivent des fanzines ou des blogs. Ils gèrent des salles de spectacles ou des radios locales.
Alors, moi, Benjamin Lemaire, qui n’ai jamais reçu de Victoire de la Musique et qui ne recevra jamais de récompense à la téloche, j’ai décidé de me remettre la Victoire du Meilleur Vomisseur Radiophonique pour faire mon discours et tenir à peu près ce langage.
Sous vos applaudissements s’il vous plait.
D’accord merci pour ce prix. C’est cool, je m’y attendais pas.
Je voudrais remercier tous les mecs qui bossent à travers nos villes et nos villages, souvent gratuitement pour que nos enfants dès leur plus jeune âge s’éduquent à la musique et se mettent à comprendre comment la faire, à la découvrir et à l’apprécier.
Je voudrais remercier tous les blogueurs qui écrivent chaque jour pour eux et leur quelques lecteurs pour défendre la musique, toute la musique, peu importe si cela intéresse ou pas, peu importe s’ils ne reçoivent pas de CD ou de place de concert.
Je voudrais remercier tous les mecs qui ont cru un jour que les gens qui écrivent sur la musique sans être payés, bah c’était quand même des gens qui pouvaient avoir un avis qui compte.
Je voudrais remercier mon prof’ de musique de collège pour ne pas avoir arrêter notre éducation à l’éternelle flute mais pour nous avoir fait découvrir aussi bien Michel Fugain que Pink Floyd.
Je voudrais remercier Radio Néo et ses compères pour supporter mes conneries chaque semaine (et un peu Virgin Radio même s’ils n’ont pas le courage de me laisser autant la parole de peur que je salisse les micros)
Je voudrais remercier mon père qui m’a fait écouter Julien Clerc, Led Zeppelin, Gainsboug, Le Forestier et les Beatles.
Enfin je voudrais remercier mon grand père qui a consacré près de 65 ans de sa vie sans la moindre Victoire de la Musique, sans le moindre Grammy, sans le moindre NRJ Music Awards, sans chercher la moindre récompense et sans jamais avoir été remunéré. Simplement pour le plaisir de faire de la musique et de l’apprendre.
Je n’oublierai jamais cette phrase que j’entends encore résonner 20 ans après, la première du manuel de solfège qu’il nous faisait apprendre et qui devrait rester notre seule méthode de jugement, loin des projecteurs télévisuels. Elle répondait à la question “Qu’est ce que la musique ?”
La Musique est l’art de combiner les sons d’une manière agréable à l’oreille. Son but est d’abord de charmer l’oreille, puis d’intéresser l’esprit, d’émouvoir le cœur et parfois même d’exalter notre âme.
Catégorie : Editoriaux
Evenement(s) : Les Victoires de la Musique
C’est tellement vrai… La musique est un art défendu par tant de personnes dans l’ombre, des passionnés, qui n’attendent rien en retour.
Mais comme tout art il a besoin parfois de lumière pour éclairer certains artistes de manière souvent éphémère.
Quand à savoir qui vont être les élus de l’année bah ça reste ceux qui ont su le mieux se faufiler, où qui ont rencontré la bonne personne.
Il reste tout de même des exceptions car cette année Stromae méritait sa reconnaissance car il y a longtemps qu’il n’y avait pas eu un auteur/compositeur aussi créatif.
La musique ça reste subjectif et une histoire d’amour et de passion.
Et toi t'en penses quoi ?