Entretien avec Fauve
L’année dernière, Fauve a commencé à se propager sur les Internet, remplissant rapidement les salles. Du Pop In à la Maroquinerie, en passant par de nombreuses Flèche d’Or, le groupe a donc décidé de se lancer dans la saison des festivals, remportant au passage le prix des Inouïs du Printemps de Bourges. C’est à cette occasion que le Transistor a réussi à s’assoir quelques minutes avec Pierre, Noki et Stéphane pour discuter de Street Fighter, Justice et autres.
Fauve
C’est Stéphane qui a trouvé l’accroche de l’interview. Quand Pierre s’excuse de leur retard en remettant ça sur le dos de la SNCF, il balance, tout fier : « y a pas de fiction, les trains sont aussi en retard dans Fauve. »
Pour démarrer la discussion du bon pied, le groupe se remémore certaines interviews.
Stéphane : C’est quoi les questions débiles qu’on nous a posées : Est-ce que vous pensez que vous êtes un porte-parole de votre génération ?
Noki : non, de la génération Y !
Pierre : Ouais je pense que… oui je me sens assez légitime maintenant que moi personnellement j’ai rempli le Bataclan…
Stéphane : à toi tout seul !
Pierre : …de parler au nom des millions de Français, je pense que même par rapport au gouvernement j’ai plus de légitimité qu’eux. »
Sans pour autant les définir comme porte-parole d’une quelconque lettre de l’alphabet, Fauve semble être en quête d’une utopie puisque cette génération n’a jamais connu que la crise.
Stephane : C’est en réaction à cette crise… Alors peut-être pas la crise économique, on parle pas du CAC40, mais plutôt la crise sociale. L’idée c’est justement de se battre contre ça, y a un réel esprit de résistance.
Noki : Même dans cette crise, il y a des instants qu’on touche, voire qu’on vit, qui sont totalement positifs et qui nous rendent heureux, et c’est ça qui nous fait tenir.
Pierre : Fauve c’est parti du moment où on est passé dans la vie active. Parce que c’est le moment où tout ce que t’avais espéré tombe. Quand t’étais plus jeune, tu avais idéalisé, peut-être à tort mais tu avais imaginé qu’est-ce que ce sera quand on sera plus vieux : ton métier, ton appart et tout… Quand t’as seize ans et que tu vois les mecs de vingt-huit ans, tu te dis, ils sont un peu cool, ils doivent kiffer la vie. »
Fauve est en réaction au passage à l’âge adulte, quand tous les fantasmes qu’ils s’étaient forgés sont tombés. « C’est quand on a commencé à bosser, à galérer pour pouvoir payer le loyer, avoir un taf qui fait chier avec un boss qui fait chier, à galérer avec les meufs… Parce que quand t’as 17 ans, tu te dis quand j’aurais 28 ans avec les meufs ce sera chan-mé, et en fait tu galères toujours autant. C’est plus une désillusion par rapport à ce que t’espères quand t’es jeune, parce que t’as vu des films et t’as lu des bouquins. Et quand tu te retrouves là, tu te dis : putain c’est parti pour 50 ans ! »
Cette résistance n’est pas à confondre avec un refus adolescent des responsabilités.
Stéphane : C’est plutôt un refus des contraintes, contrainte de la routine, contrainte de certaines conventions sociales qui te gavent,
Pierre : c’est une envie de « plus ». C’est pas aspirer à plus de liberté ou plus d’argent, mais juste quelque chose de plus exaltant ! Pour nous, Fauve c’est une sorte d’échappatoire : ça nous permet d’apporter une petite saveur supplémentaire à nos vies … pour sortir de la routine. »
C’est en ça que Fauve donne cette impression de bouffée d’air dans un quotidien morose. « Mais la porte ouverte, elle est d’abord pour nous-mêmes. L’alternative ou cette voie, on se l’offre à nous-mêmes. C’est pour ça qu’on se dit Fauve c’est notre béquille mais c’est aussi notre lanterne. C’est Fauve qui va nous guider et nous offrir cette opportunité d’échappatoire. Mais on s’est jamais dit, Fauve ça va devenir quoi que ce soit. Tant mieux si certains le voient comme une aide, mais à la base c’est super égoïste comme démarche : c’est fait pour que nous cinq en tant qu’individus, on se sente mieux.
Stéphane : S il y avait personne je pense qu’on continuerait à le faire.
Noki : Et justement là ça va hyper vite et ça nous fait plus flipper qu’autre chose.
Pierre : Parce qu’il y a un risque de perdre ce truc qui est le plus important pour nous aujourd’hui. Parce que la fonction primaire de Fauve, c’est d’être un exutoire.
Stéphane : ouais le Bataclan, on va pas faire rentrer les gens, on va juste jouer devant personne. »
Quand leur self-thérapie s’est emballée, ils se sont contentés d’envisager la suite logique en faisant des concerts. « On pense pas à comment ça va être reçu ni à comment s’adresser aux gens, au contraire, on s’adresse vraiment à nous.
Noki : Mais on sait que ça peut voyager, c’est pour ça qu’on met aussi le mot collectif dessus, pour avoir la possibilité de le partager.
Stéphane : Ce projet, on peut pas le garder pour nous.
Noki : A la base, on a monté tout ça depuis nos chambres, pour nous. Ca part d’un texte, ça part d’un besoin d’écrire. Ensuite, on le met en musique puis en vidéo.
Stéphane : Parfois aussi, on fait de la musique pour une vidéo qui existe déjà.
Noki : Ca se répond, parce que justement on essaie de se faire du bien mutuellement, et…
Stéphane : ouais ouais on fait tous l’amour ensemble, tu veux dire ?
Noki : On fait pas l’amour, on se fait du bien.
Stéphane : l’amour, c’est autre chose…
Pierre : l’amour, c’est bien trop grand. »
A leurs yeux, le mot Fauve englobe toute cette démarche. « Dans Fauve, ce qui nous intéressait c’était l’adjectif, c’est-à-dire pas la couleur, mais ce qu’on peut y associer en terme d’imaginaire. Et ça correspond à notre musique : un peu direct, un petit peu sauvage, presque parfois un peu élégant sans faire dans le truc un peu pompeux. »
Sauf qu’ils n’étaient pas les seuls à avoir flashé sur le film de Cyril Collard.
Pierre : De là, on a commencé à développer le projet, et quand on a sorti notre première chanson, ‘Kané‘, ça faisait déjà un an qu’on se baladait avec ce nom : entre nous, c’était Fauve. Et cet artiste suisse nous a dit : Je m’appelle déjà Fauve, faut que vous changiez. Mais ce mot cristallisait tellement toute l’intention…
Noki : En plus, des groupes qui s’appellent Fauve, on s’est renseigné un petit peu, et y en a plein !
Stéphane : Une vingtaine quoi,
Pierre : C’est comme Justice, y a deux cents groupes qui s’appellent Justice, alors Fauve, c’est un mot tellement générique que…
Stéphane : D’ailleurs, y a un groupe de hard-core qui s’appelle Justice, qui est mieux que l’autre… écoutez Justice, c’est vachement bien.
Pierre : Et à l’époque, on n’était rien, on avait une vidéo que même pas cent personnes avaient vue !
Noki : ouais, va voir les autres groupes qui ont plus de fans que nous !
Stéphane : Mais au début, on a été bienveillants : on a proposé de l’orthographier différemment. Et lui, il sort la lettre d’avocat.
Pierre : A la base, on se disait même, on va pouvoir faire des concerts ensembles, ce sera marrant. C’est dommage pour tout le monde.
Noki : Mais on part faire des concerts en Suisse bientôt… Chez lui !
Stéphane : Ca va être comme dans Street Fighter : le combat de Ken vs Ken ou de Ryu contre Ryu !
Réclame
Blizzard, le premier EP de Fauve, est enfin paru.
Fauve sera en concert au Bataclan le 7 juin, mais aussi aux Eurockéennes, aux Francofolies, à Dour et à Rock en Seine… entre autres !
Lire pourquoi Le Transistor aime Fauve
Lire le live report d’une Nuit Fauve à la Flèche d’Or
Remerciements : Mélissa
Catégorie : A la une, Entretiens
Artiste(s) : Fauve, Fauve ≠
[…] Et si vous voulez lire l’interview de Fauve… […]
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